Viols et conséquences

Lundi 19 mai 1 19 /05 /Mai 12:46





Boulversée, remuée, perturbée. Ecrire "le dire" m'a pour le moins secoué les entrailles.
Partie pour partager un moment important, mon esprit a emprunté un chemin inattendu.


Plus que de la narration, rédiger cet article fut une épreuve. Faire face à toutes les questions qui se bousculaient, revivre l'émotion de ce samedi après midi, comprendre que ce moment avait bien plus de sens que je ne le pensais m'a profondément ébranlée.

L'écriture avançant, je constatais certains paradoxes, certaines zones d'ombre.

Le fossé entre mon aisance à parler de mes agressions et le mutisme buté affiché à mes parents pose un grand nombre de questions. Ces deux attitudes tellement opposées sont elles vraiment de mon fait ou sont elles l'expression de deux Ether distinctes et semblables?

Le sentiment d'être duelle cet après midi là, d'être moi même et cette enfant que j'étais à six ans m'émeut au plus au point.

Perdue dans les méandres des mes émotions, j'ai appelé une amie très tard hier soir.
J'avais besoin de mettre de l'ordre dans mes pensées, de trouver la sortie de ce nouveau dédale.
Besoin d'être rassurée, d'entendre que ma confusion, ma sensibilité à fleur de peau n'étaient pas surpenantes.
Parler à une oreille amicale, écouter son opinion pour faire la lumière sur ce malaise.

J'ai raccroché plus d'une heure plus tard, épuisée, mais avec une image en tête; celle d'un champ parsemé de fleurs blanches.




Cette discussion m'a permis d'accepter les oppositions contre lesquelles je luttais, sans vouloir admettre qu'elles sont dûes à la rencontre improbable d'une personne avec la part d'enfant qui n'était plus en elle depuis sa blessure.

Je savais depuis quelques temps que je devais réconcilier la petite fille et l'adulte, que je devais retrouver la partie de moi qui était resté bloquée dans cette cave.
J'ignorais comment et où la chercher, je doutais même de sa survie.

Hier soir, j'ai admis qu'elle était là, que depuis cette discussion avec mes parents, j'étais pour la première fois entière, complète.

Et depuis hier soir; bien que profondément bousculée, émotivement plus que fragile, je suis heureuse.

Parce qu'enfin, je sais, je suis sûre que j'ai de nouvelles armes, de nouveaux atouts pour affronter ma vie.

Cette fois, ce n'est pas de la rencontre avec autrui dont je tire de la lumière, mais de moi.

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Dimanche 18 mai 7 18 /05 /Mai 00:00
Après le mutisme de l'oubli, le désespoir de la compréhension des évènements, la psychothérapie m'a permis de pouvoir parler de mes agressions. Je les ressentais enfin sans honte, sans craindre qu'elles ne m'aient diminué dans ma valeur d'humaine.

Je me suis mise à parler beaucoup de ce qu'il m'était arrivé, de mes ressentis, de mes doutes, de mes peurs et de mes espoirs.
Dès que je me sentais un minimum en confiance avec une personne, je lui disais.

Le poison qui n'est plus en toi ne te détruit plus.

Je vomissais ces toxines à tout va, junkie du malheur en tentative de cure, je cherchais par ces logorrhées interminables à laver mon esprit, mon corps et mon coeur des injections quotidienne de tristesse et de douleur que je m'infligeais.

Je cherchais aussi en celui qui m'écoutais une forme d'absolution d'un pêché pourtant jamais commis, la douceur d'entendre, de lire dans le regard de l'autre que je ne réagissais pas de manière démesurée. Oui, c'est dur ce que j'ai vécu; non, on ne s'en sort pas facilement; peut être je serai un jour en paix.

Pas un ami, pas une personne proche ignorait mon histoire. Tous avaient un jour ou l'autre donné un avis, un conseil.
Chaine du coeur inconsciente de l'impact de chaque parole, ignorant que chacun était un maillon qui me permettait de tirer ma carcasse hors des flots.

Cependant, il manquait le fermoir à cette chaine inestimable. Ces deux élements sans lesquels aucun collier n'est complet, ces pièces majeures me faisaient encore défaut.

Jamais je n'avais encore parlé à coeur ouvert de mes agressions avec mes parents.
Elles avaient été évoquées, survolées, mais il m'était toujours impossible de leur ouvrir mon coeur.

Bloquée par ces relans de salissure, je voulais plus que tout éviter d'éclabousser ceux qui comptaient le plus à mes yeux.

Principalement deux angoisses m'empèchaient d'enfin libérer la voie de la parole. La honte qui persiste au plus profond de moi d'avoir déçu mes parents et la peur de les blesser.

J'ai tenté à de nombreuses reprises de leur parler, mais ma nervosité menait la discussion à peine entamée vers une dispute qui cloturait le débat.


La semaine dernière, je suis partie me reposer quelques jours chez eux. Arrivée avec un inclassable en transit dans mes valises et en attente d'une amie pas si silencieuse que l'on pourrait le croire, je bénéficiais de trois jours innondés de soleil seule avec mes essentiels.

Je ne parviens pas à me souvenir comment le sujet de la pédophilie est arrivé dans la conversation. Probablement à la manière d'un chat; sans prévenir, par une porte dérobée de mon conscient.
 Toujours est il que le sujet est arrivé, au cours d'un déjeuner en terrasse, tous trois baignant dans la torpeur issue de la délicieuse cuisine de ma mère.

J'étais détendue, je ne pensais pas que j'allais parler de moi; j'ai appris depuis longtemps à dissocier mon expérience d'une discussion sur le sujet.

Mais cette fois ci fut différente. J'ai parlé. Pas encore à coeur ouvert, pas de tout.

Mais l'essentiel, je l'ai dit.

Je leur ai dit la peur, la honte, la souffrance. Je leur ai dit combien j'avais du mal à évoluer dans cette vie si mal entamée, pourquoi j'étais parfois si agressive, dure et froide, combien j'ai dû lutter pour être celle que je suis et dont je ne suis toujours pas satisfaite.

Je voulais me livrer, peut être donner des réponses à certaines questions, mais je ne m'attendais pas à en recevoir ni à gagner un nouveau lot de questionnements.

J'ai appris que ma mémoire m'avait fait défaut sur un point que je ne comprenais pas. Je ne leur avais jamais parlé de ça. Même lorsque c'est arrivé. Je ne l'ai en fait dit qu'à mon frère plusieurs jours plus tard et c'est lui qui est allé leur dire. De là; ils ont écrit au commissariat qui les a appelé pour leur demander de me faire venir afin que je tente d'identifier mon agresseur.

Comment ces quelques jours se sont ils retrouvés effacés de ma mémoire?
Pourquoi mon souvenir bloque t'il entre mon passage chez les buralistes amis de mes parents lorsque je me suis enfuie de la cave et le moment où j'entre dans le commissariat?

Jamais je n'avais dit quand et comment tous ces souvenirs sont remontés à la surface. Jamais je n'avais parlé de tous ces blocages à l'adolescence qui n'ont pris un sens que le jour où je me suis rappelé...

Je voulais leur préciser un ressenti et je découvre qu'ils ignorent l'essence même de mon agression. Je réalise que bien plus que de ne leur avoir jamais parlé avec mon coeur, je ne leur ai jamais parlé de ça tout court.

Pourquoi moi, si encleinte à parler de tout et de rien, partageant les évènements de ma vie avec eux, ai je pu taire aussi longtemps sans même le réaliser une chose aussi grave?

Pour eux, un monsieur m'avait emmené dans une cave et avait mis sa main dans ma culotte. Pour eux, seule la parole de mon frère faisait foi, puisque seule existente...

Quel étrange sentiment que de se découvrir si pudique, si différente...

Est ce le fait de leur parler à eux, de constater que je les avais toujours totalement écarté de ma plus grande blessure; je l'ignore; toujours est il que j'ai fait un bond 28 ans en arrière.
Chaque minute qui passait me faisait vivre un nouveau souvenir, une nouvelle émotion, une nouvelle douleur.

La discussion devenait trop difficile pour moi, et à la fois, totalement indispensable. Je voulais leur parler; comme si ma vie en dépendait.

Mes barrières se sont effondrées, ma pudeur s'est envolée. Et avec elle, ma carapace d'adulte forte. Je pouvais, je voulais enfin pleurer devant mes essentiels; ceux qui d'un seul regard me transmettent tout l'amour et la tendresse de la planète.

Quel énorme paradoxe que de parler comme un adulte et de pleurer des larmes d'enfant en même temps!

Quelles vannes se sont ouvertes ce samedi après midi? J'ignorais leur existence, je ne connaissais pas non plus le barrage qui contenait tous ces flots.

Vider cette eau de moi, oter ce poids de mes épaules m'ont fait apparaitre un autre barrage.

Ma mère m'a dit qu'elle n'avait jamais osé me poser de questions, me demander précisément ce qu'il s'était passé dans cette cave.

A cette question, j'ai pensé à ce que m'a dit une personne très chère à mes yeux.

Si ça, je le dit un jour, si j'y parviens, je ne sait pas comment je réagirais; mais le trouble que cela évoque en moi me fait craindre une telle violence que je n'y résisterais pas.

Alors, je me demande: ai je donc si peu avancé que je sente si fort les tourbillions de ces eaux usées? Pourquoi ces remous sont ils si violents, cette colère sous jacente si forte?

Ca me fait peur d'avoir en moi une énergie négative aussi énorme. Quelle forme prendrait elle? La haine? La colère? La douleur? La honte?
Tout celà à la fois?

Moi qui peux si bien parler de ça, je me sens incapable de le dire vraiment. Pas encore.







Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Dimanche 20 janvier 7 20 /01 /Jan 23:25

Réaliser au cours d'une conversation que ses repères depuis l'enfance diffèrent de ceux des autres.
Que même une des personnes ayant grandi à ses côtés a eu une façon d'aborder la vie totalement différente de soi...

J'ai dîné hier soir avec des amis (si tu me lis, c'était trèèès bon), et au cours d'une converstion, mon esprit embué de la fatigue de la semaine, a capté quelques phrases de façon plus précise que les autres.

Je me suis pris dans la gueule quelque chose que je savais, mais que je ne voulais pas admettre...
Ou comment un traumatisme change la vision de la vie...

Discussion soutenue et pas forcément agréable avec cette amie chère à mon coeur qui souhaite partir à l'autre bout du monde pour un long moment; en point virgule, parenthèse explicative ou besoin de le dire ou de justifier un besoin, une phrase.

Cette phrase, reprise par mon frère tel un écho. Oui, bien sûr qu'il comprend comment un traumatisme fait tomber les barrières, évidemment qu'il sait aussi que nos repères changent, que la vie se découvre sous un autre angle, que certaines valeurs se trouvent changées à jamais. En bien peut être...

Et moi de me dire "mais de quoi parlent ils?"; "quels sont ces barrières, ces tiroirs dont ils parlent?" "ont ils réellement eu besoin de vivre ça pour réaliser que la vie est fragile?"

Si mes repères ne sont pas les mêmes, c'est que la confrontation si jeune avec la violence, l'insoutenable, l'horreur a conditionné ma façon de me développer.
J'ai grandi dans la peur de perdre mes parents, refusant d'être séparée d'eux plus d'une journée ou deux de peur de le perdre à jamais. 
Je répètais à ma mère "si vous avez un accident, je veux mourir avec vous".

Là où d'autres se construisent avec les autres; parents ou amis; comme point d'ancrage, j'ai grandi avec cette conscience très nette et violente que tout pouvait basculer d'une seconde à l'autre.
Où était l'insouciance, la légèreté?

Dans les apparences, puis, dans l'alcool qui m'aidait à me débarrasser de ces démons terrifiants qui me montraient toutes les horreurs qui peuvent survenir, toujours; à chaque instant.

Ce qui me blesse dans cette constation; c'est que je ne sais pas si je me suis construite sur des bases qui me permettront d'être heureuse un jour.
Je me suis demandée hier soir si je ne m'étais pas bâtie sur des sables mouvants; prêts à m'avaler à n'importe quel moment.

Là où mes amis; prenant conscience de la fragilité de la vie; veulent profiter au maximum; je me cache, je me terre comme une petite fille qui attend que ça tombe. Parce que ça viendra; c'est sûr.
Ca vient toujours...

Je n'ai jamais eu de barrières ou de tiroirs à détruire ou déranger. C'est l'âge, la nécessité de survivre qui m'y ont forcé, dans les seuls domaines affectifs d'ailleurs.
J'ai toujours vu ma vie comme un terrain vierge, rien n'y avait jamais poussé, ni même germé.
Juste le néant que je me devais de combler.

Mais alors, si ces barrières qui tombent; ces tiroirs qui s'entrechoquent sont un signe que l'individu s'est construit normalement et qu'un traumatisme boulverse les élèments existants; cela veut il dire que moi, qui n'ai jamais eu ces barrières et ces tiroirs, je ne pourrait jamais m'accrocher à ces acquis?

Parce que, même s'ils sont perturbés, boulversés voire inversés; ils existent chez eux...

Et mon néant à moi...du coup, j'en fais quoi?

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Mardi 15 janvier 2 15 /01 /Jan 13:57

Une des conséquences majeure de mes agressions est la peur des autres, quels qu'ils soient.
Je me sens en danger face à l'autre, j'ai peur qu'il découvre mes failles, qu'il lise en moi et utilise ce qu'il a vu pour me blesser.

Plus le temps passe et plus je me suis confrontée à ce problème, puisque je rencontrais de plus en plus de personnes. Je me sentais agressée de toutes parts, jamais à l'abri, toujours sur la défensive.

Le peu de personnes qui avaient eu accès à ce que j'étais m'avaient blessée, humiliée, je ne voulais pas que cela recommence.
Je me suis donc fabriqué un blindage. Redoutable d'efficacité, il m'a cependant probablement plus couté que servi...

A trop avoir peur des autres, on cherche à les fuir. Le hic; c'est que c'est impossible. Ils sont partout, tout le temps. Le moyen que j'ai trouvé était de ne montrer de moi que ce que je voulais qu'ils voient, de ne jamais me laisser atteindre par qui que ce soit, de ne jamais, non; plus jamais avoir mal...

Je souris de lire ces lignes, tant mon raisonnement d'alors était stupide...

Pour ne pas être blessée, j'ai envoyé aux autres l'image d'une jeune femme dure, insensible, exigeante et agressive. Mon rôle était parfait, personne ne voyait (ou ne voulait voir) la personne sous le vernis.
J'entendais souvent "toi, tu es dure" ou encore "mais cesse cette agressivité!"

Non, j'étais fière de ma carapace, fière que rien ne m'atteigne plus, heureuse de voir que je vivais avec les autres sans qu'ils ne soient réellement avec moi. Puisque ce que je suis, je l'avais terré au plus profond de moi.

Personnage de composition et personnalité se sont mèlés, pour finalement ne laisser de la place qu'à la jeune femme froide et insensible que j'avais inventé.
Pas que celle que j'étais ne soit pas sociable ou souriante; mais rien ne m'atteignait.

Un soir, une amie me téléphone et me dit au cours de la conversation "mais aimes tu quelqu'un au fond?"
Ma première réaction a été de dire que bien évidemment j'aimais plein de monde! La preuve, il y a des gens autour de moi!
Mais au fond de moi, je ne ressentais pas l'amour que je prétendais avoir pour les autres.
J'ai raccroché le combiné, je suis restée hagarde quelques minutes.

Incroyable! Je ne ressens rien! Pour personne. Aucun amour, aucune tendresse, aucune sympathie pour qui que ce soit. Même ma mère, je n'éprouvais alors absolument rien pour elle et son sort m'était parfaitement égal.
Et plus que ces sentiments, je ne ressentais ni peine, ni douleur, ni joie, ni haine...

Rien. Que le vide, le néant. le degré zéro de l'émotionnel. Nada, que dalle.
Première émotion ressentie quelques jours  plus tard: la peur. Ma vieille copine se devait de montrer le bout de son nez pour me faire comprendre que j'étais quand même encore un peu vivante!

Peur de n'être qu'une coquille vide, de passer à côté de ma vie, d'être seule, puis; la peur de blesser mes parents.

J'ai cherché comment réapprendre à ressentir les choses, les gens, les émotions.
Commencer par regarder un coucher de soleil et chercher une émotion en moi. Même minime, juste un frissonnement, un tout petit quelque chose.
Un point de départ, en somme.

J'ai dû en regarder des couchers de soleil, des oiseaux qui virevoltaient sous mes yeux blasés, des coccinelles qui venaient me déranger, des cieux roses, gris, pourpres avant qu'enfin, une petite émotion vienne me titiller l'estomac.

Et c'est venu. Pour un rien d'abord, puis pour une multitude de petites choses sans interêt.
J'ai dû lutter pour m'arrêter sur ces petites choses, pour chercher et chercher encore ce qui rend les gens vivants...

Mais pour les êtres humains, la tâche fut rude. Aimer l'autre, se laisser aimer, offrir à l'autre ce que l'on est; avec nos douleurs et nos blessures. C'est difficile...très dur.
J'y suis arrivée. En acceptant ce que les autres me donnaient, en appréciant le cadeau qu'ils me faisaient en m'aimant malgré tout.
J'y suis arrivée aussi en avouant enfin que j'avais mal. Mal d'être différente, mal d'être marquée à vie au fer rouge, mal de ces blessures qui ne se referment jamais complètement.

J'ai tellement peur!! Comme une petite fille perdue dans le noir, ne sachant pas quelle main tendue saisir.

Si aujourd'hui j'aime les autres, j'aime ce qu'il y a autour de moi; c'est parce que je ne veux pas revenir à celle que j'étais; à cette jeune femme vide.

Mais chaque jour est une lutte, chaque relation un numéro d'équilibriste.
Je dois me battre contre moi même pour ne pas me refermer comme une huitre dès que je préssens un danger. Je me bats pour ne pas fuir loin des gens que j'aime, je dois lutter pour ne pas leur donner de bonnes raisons de ne plus m'aimer...

Parce qu'en moi, il y a toujours cette frayeur intense; cette peur immense qu'à nouveau on me blesse.
Peur que l'on brise le peu qui n'est pas encore brisé, peur de ne pas me relever, la prochaine fois.



 

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Samedi 5 janvier 6 05 /01 /Jan 13:15

Parler de ses traumatismes, c'est pour moi comme un accouchement. Long, difficile, laborieux.
J'y pense, y repense, me demande comment formuler, si je fais bien de le dire, de l'écrire.
Je construis le texte dans ma tête, le démolis pour mieux le refaire.
Et j'attends, sagement le moment où je me sens capable de dire ces choses qui me rongent.

Ether y el sexo part 1 a été difficile à expulser, se présentant peut être par le siège, j'ai dû utiliser des forceps pour pouvoir sortir ce poids.

Aujourd'hui je suis prolixe, j'ai besoin de dire les choses.

Ether y el sexo part 2; c'est l'histoire d'une petite fille à peine remise de son premier traumatisme qu'elle doit en revivre un autre...

Un an plus tard à peut près.

Les cauchemars s'estompaient à peine. je rêvais moins de cette cave, que je m'enfuyais en m'accrochant sous une voiture, je me réveillais moins en sursaut, hurlant d'une voix muette, éteinte par la terreur.
Je tapais moins au mur en pleine nuit, appelant ma mère au secours par le seul moyen à ma disposition, mes membres cloués au lit, ma voix partie.

La vie reprenait ses droits dans le silence imposé par les autorités, ma vie s'écoulait à nouveau comme avant, à peine différente.

C'est alors qu'  "il"  est revenu. "il" allait et venait dans notre vie de famille, venant quelques jours voir son père qui se trouvait être par un mauvais coup du destin aussi le mien.

"il"; mon demi frère. Une bonne dizaine d'années de plus que moi. Ce grand bonhomme qui nous faisait fumer des clopes dans l'allée de l'immeuble sans j'espère se rendre compte que nous étions des petits enfants...

"il" revenait.

Depuis sa dernière venue, mes parents avaient déménagé leur chambre pour m'y installer et me laisser la jouissance d'une chambre seule alors que je partageais auparavant mon univers avec mes deux frères.

Les choses avaient donc changées..."il" dormirait dans ma chambre...Et "il" avait changé aussi.
Plus grand, plus fort, plus bête.

Mon lit est devenu son lit, je dormais par terre, sur un matelas installé pour l'occasion.
"il" parlait toujours beaucoup. De lui, de lui et un peu de lui. De combien il était beau et fort, de tout ce qu'il savait de la vie.
La lumière de chevet allumé, il parlait et je voulais dormir, petite fille imperméable à ses narrations sans fins d'histoires sans interêt à mon âge d'alors.

Et il n'a pas fait que parler.

"il" voulait que je le touche, que je touche cet endroit de lui qu'on ne voit normalement jamais. Sa nudité sur mon lit, cette chose dressée sous mes yeux, sa main qui prend la mienne.
Il accompagnait le geste qu'il imprimait à ma main prisonnière de sa main à lui. 
Je ne voulais ni voir ni toucher cette chose dure, je voulais retirer ma main. Je ne voulais plus sentir ça sous mes doigts, je ne voulais pas avoir ce regard affamé et vicieux vissé sur moi, je ne voulais plus voir ce sourire immonde sur ses lèvres. C'est mon demi frère! Qu'est ce qu'il fait?
Pourquoi il fait ça?

J'avoue ne pas me souvenir de ce qu'il s'est passé ensuite cette nuit là. Peut être ne vaut il mieux pas, je l'ignore; mais je n'ai aucun souvenir de plus que ces caresses forcées...

Mais tout à changé ce soir là. Il m'a dit le lendemain de ne rien dire à personne, que cela tuerait notre grand mère et que je ne voulais pas être responsable de la mort de grand mère; n'est ce pas?
Pour mieux imprimer son empreinte, il profitait de chaque moment seul avec moi pour me donner un coup.
De poing, de pied, avec une baguette qui était chez nous.

Dehors, il s'amusait et me faisait "malencontreusement" mal. Me poussait contre le bec d'évacuation d'eau du balcon du rez de chaussée avec une force telle que le bec s'est brisé contre mon dos.
Il me traitait de douillette, de poule mouillée.

Je n'ai jamais rien dit de cette nuit là, de ces coups donnés dans le dos du reste de la famille. J'ai obéi à ses ordres; trop appeurée d'être la responsable de la mort de notre grand mère pour oser parler.

Et puis, j'ai oublié. Mon esprit a totalement rayé ces évenements de mon esprit pendant longtemps.

Je le haÏssais, mais j'ignorais pourquoi. Il me terrorisait, mais je ne comprenais pas pourquoi.

Et puis, il s'est fait rare chez nous. Comme un aveu masqué de ses actes, il a disparu.

Un jour, durant la période où je tentais d'exorciser mon agression, pendant ces moments tellement douloureux, ces images me sont revenues à la mémoire.
Comme si ce que je traversait n'était pas assez difficile, je devais affronter encore ces images là, ces souvenirs là, pourtant depuis longtemps enfouis dans un tiroir bien fermé de mon esprit.
Pourquoi se souvenir de ça??

Je n'en n'ai parlé à mes parents qu'à l'âge de 31 ans. Impossible avant d'évoquer ces souvenirs en regardant mon père dans les yeux. Terrorisée par l'empreinte de cet adolescent d'alors qui m'avait fait jurer de ne rien dire.

Ce jour là, j'ai eu un immense poids en moins sur la poitrine, mes parents m'ont regardé comme une victime, m'ont reconnue comme une victime. 
Je n'y étais pour rien. Je n'étais responsable ni de cette agression dans la cave, ni des actes de mon demi frère.
Pour la première fois en 25 ans, je me suis sentie victime; dédouanée de toute responsabilité, acquittée, non coupable. Un non lieu du procès que je me faisais depuis si longtemps. Un soulagement immense!
Pour la première fois, j'ai exigé quelque chose. J'ai imposé le respect de moi en demandant aux gens que nous avions en commun de choisir. 
Accepter de le cotoyer était accepter ce qu'il m'avait fait. Lui ou moi; mais pas les deux.
Pas de prescription possible. je ne pardonne pas, j'en suis incapable.

Je me suis sentie plus sereine, apaisée de cette parole enfin débloquée.

Jusqu'à ce que je doive le croiser par hasard, chez sa soeur.
Terrifiée, tétanisée, j'ai su me composer un personnage hautain et froid. Très loin de ce que je suis pour ne laisser aucune porte ouverte. Son attitude m'a aidé. Mal à l'aise, très gèné, il ne savait comment se comporter.

Mais pourquoi n'ai je pas su alors lui dire? Lui dire ce que je pensais de lui au fond de moi. Que je le haïssais, que je le vomissais, qu'il était un monstre immonde à mes yeux, qu'il m'avait achevée, qu'il avait fini de me tuer.
Impossible d'évoquer le sujet; impossible d'être moi face à lui.

La petite fille de 7 ans dont il avait abusé, qu'il avait frappé ne pouvait pas. Celle que j'étais ne pouvais pas empècher cette petite fille qui est toujours en moi de revenir; effrayée par ce monstre de la nuit.

Je ne l'ai jamais revu depuis, je ne le reverrai pas, je ne l'affronterai pas; la force, le courage me manquent.

 

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Vendredi 28 décembre 5 28 /12 /Déc 13:14

Pas de jolies phrases, pas de style réfléchi pour un des sujets qu'il m'est le plus difficile d'exprimer.

Parce que même si j'aime le sexe quand je suis avec mon homme (quand j'en ai un...); ça reste the sujet hyper délicat, porteur de toutes mes angoisses, mes terreurs nocturnes.

Adolescente, j'entendais mes copines parler de première fois, de virginité, du sang ou de la douleur de la déchirure; je me demandais de quoi elles parlaient.
A 17 ans, j'ai tardivement, mais violemment compris pourquoi leur discours m'était inaccessible.

Je savais, je me souvenais de ce jour là, l'année de mes 6 ans. Je me rappelais bien cet homme grand, bien habillé, les cheveux poivre et sel qui m'a emmenée dans une cave parce qu'il "travaillait avec mon père et avait des papiers à me donner"

Je me souvenais bien de la suite, douloureuse, terrifiante.

Mais jamais depuis ce jour là, on ne m'en a reparlé. A cette époque, la police était bien moins au fait qu'aujourd'hui en matière de pédophilie.

Dire à des parents "ne lui en parlez pas, elle oubliera" semble de nos jours totalement surréaliste.
Mais en 80, c'était  la façon de traiter ces cas; et des parents dépassés par les évènements croient la police...

Alors, jamais on ne m'a dit que ce que cet homme avait fait était mal. Jamais on ne m'a dit que j'étais la victime d'un malade, d'un détraqué.

J'ai grandi; navigant entre cauchemars terrifiants et fascination pour le sexe. Désir et rejet; aussi violents l'un que l'autre.

Adolescente, tout s'est compliqué, je ne maitrisais plus mon corps. Dès qu'un garçon s'approchait de moi, je devenais raide comme une barre de béton et ne maitrisais plus mes gestes de refus. Je pouvais devenir tellement violente...
Un garçon me disait bonjour? Il prenait mon poing dans la figure...
Et je ne comprenais pas ce qu'il se passait.

Et un soir, un soir comme un autre, je vois un reportage sur une jeune fille ayant vécu la même chose. Mon univers s'est écroulé, comme ça; le temps d'un reportage qui racontait mon histoire...
J'ai mis des mots sur mes angoisses, une cause à mes peurs, un sens à mes ressentis.

Violente, la douleur s'est abattue sur moi. Elle me submergeait, me dévorait. Ma vie est devenue sombre, triste, haineuse.

Je criais ma douleur sans dire d'où elle venait. Personne ne comprenait ce qu'il m'arrivait. 
Je pensais qu'on me rejettait; personne pour me tendre la main, pour m'aider.
Je raconte mon histoire à mon amie (la seule); elle raconte partout que j'invente ça pour me faire mousser. Mes parents me regardent, perdus, ne savent pas d'où vient cette douleur morale si violente.

Je me rappelle d'un jour où ma mère faisait à manger et que je lui ai dit "mais aide moi...aide moi..." et m'écrouler sur le sol de la cuisine; secouée de sanglots.

Et j'ai commencé mes études supérieures. Ni convaincante, ni convaincue; mais la vie avance et je devais faire quelque chose de ma peau. 
Ca faisait alors un an que je me débattais dans la noirceur, la tristesse, la haine de moi, de mon corps, de mon âme.
Je devenais de jour en jour plus isolée, plus noire, plus violente.

Je haïssais le monde, les gens heureux, les filles "normales", les sourires.

J'étais la reine des faux semblants; je savais être la super copine et ne rien montrer aux autres de ce qui me rongeait.

Mais une personne a vu. Elle s'appelle Virginie, elle a vu, elle m'a aidé. Ensemble, après un cours, nous sommes allées voir un intervenant qui était pédopsychiatre. 
Lui dire, lui raconter, lui demander de m'aider. Quelle difficulté!! 
Son regard tendre, son sourire désolé restent gravé dans ma mémoire. Il m'a orienté vers un psy.

Je ne voulais pas y aller; ça y est, j'avais parlé, c'était bon. Je ne voulais pas dire à quelqu'un combien j'étais sale, monstrueuse. En plus, ça se voyait!!
Dans ma tête, c'était évident. On ne voyait que ça et si les gens faisaient semblant de ne rien voir, c'est qu'ils étaient bien hypocrites!!

Je refusais toujours  d'aller voir le psy; mais mon état empirait de jour en jour. Je rentrais chez moi, dans mon petit studio et me frappais la tête contre les murs. Ne plus penser, chasser les images, que ça sorte, que ça sorte!!

Virginie a fini par ne plus me donner le choix. Elle a pris rendez vous et m'a trainé chez le psy. Lorsqu'il a ouvert la porte, elle m'a poussé à l'interieur de son cabinet.

J'ai dû raconter, courageusement, que j'étais une saleté, un microbe puant, une traine misère...Je me suis arraché le coeur, le reste de fièrté, les tripes pour lui parler. Un peu.

La première chose qu'il m'ai dite; c'est "vous n'oublierez jamais, vous apprendrez à vivre avec".

Pas la réponse que je voulais, moi. Je veux une lobotomie! Je suis venue jusqu'ici, je suis à nu, je n'ai plus rien, je ne suis plus rien, tuez moi, ça ira plus vite!

Non, on doit parler, chez un psy. De tout, de rien, de ce qu'on ressent, de ce qu'on aimerait ressentir...
Gonflant, très gonflant. Très long, très dur.

Et un jour, je me rends compte que je n'ai plus envie de mourir, que j'ai envie d'être un peu plus jolie dans mon miroir, que je veux être normale.

Il a réussi, je ne veux plus mourir, je ne me vois plus comme une paria, je commence à comprendre que je ne suis qu'une victime. Que je n'ai aucune responsabilité dans ce qu'il m'est arrivé.

Je crois alors que tout est fini, j'ai un copain, j'ai minci,je vois le soleil, je vois qu'il existe encore des oiseaux, je me crois sauvée.

Il m'a sauvé la vie, mais le travail qu'il restait à faire est immense et je l'ignorais alors. 
On ne va pas mieux comme ça, en 9 mois. On ne règle pas tout aussi vite.

Et libèrer tout ça fait aussi remonter d'autres souvenirs; aussi immondes...à gèrer, encore.

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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